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sculpt-035

RUFFIN 

Ruffin commence à grisonner ; mais il est sain, il a un visage frais et un œil vif qui lui promettent encore vingt ans de vie ; il est gai, jovial, familier, indifférent ; il rit de tout cœur, et il rit tout seul et sans sujet ; il est content de soi, des siens, de sa petite fortune, il dit qu’il est heureux ; il perd son fils unique, jeune homme de grande espérance, et qui pouvait un jour être l’honneur de sa famille ; il remet sur d’autres le soin de le pleurer ; il dit : « mon fils est mort, cela fera mourir sa mère », et il est consolé. Il n’a point de passion, il n’a ni amis ni ennemis, personne ne l’embarrasse, tout le monde lui convient, tout lui est propre, il parle à celui qu’il voit une première fois avec la même liberté et la même confiance qu’à ceux qu’il appelle ses vieux amis, et il lui fait part bientôt de ses quolibets et de ses historiettes ; on l’aborde, on le quitte sans qu’il y fasse attention, et le même conte qu’il a commencé de faire à quelqu’un, il l’achève à celui qui prend sa place.